Выбери любимый жанр

Contes merveilleux, Tome I - Andersen Hans Christian - Страница 4


Изменить размер шрифта:

4

Et c'etait vrai, cette etoile semblait leur indiquer le chemin. Ils grimpaient et rampaient. Quelle affreuse route! Mais il la soutenait et l'aidait, il lui montrait les bons endroits ou appuyer ses fins petits pieds, et ils arriverent tout en haut de la cheminee, ou ils s'assirent epuises. Il y avait de quoi.

Au-dessus d'eux, le ciel et toutes ses etoiles, en dessous, les toits de la ville; ils regardaient au loin, apercevant le monde. Jamais la bergere ne l'aurait imagine ainsi. Elle appuya sa petite tete sur la poitrine du ramoneur et se mit a sangloter si fort que l'or qui garnissait sa ceinture craquait et tombait en morceaux.

– C'est trop, gemit-elle, je ne peux pas le supporter. Le monde est trop grand. Que ne suis-je encore sur la petite table devant la glace, je ne serai heureuse que lorsque j'y serai retournee. Tu peux bien me ramener a la maison, si tu m'aimes un peu.

Le ramoneur lui parla raison, lui fit souvenir du vieux Chinois, du «sergentmajorgeneralcommandantenchefauxpiedsdebouc», mais elle pleurait de plus en plus fort, elle embrassait son petit ramoneur cheri, de sorte qu'il n'y avait rien d'autre a faire que de lui obeir, bien qu'elle eut grand tort.

Alors ils ramperent de nouveau avec beaucoup de peine pour descendre a travers la cheminee, le tuyau et le foyer; ce n'etait pas du tout agreable. Arrives dans le poele sombre, ils preterent l'oreille a ce qui se passait dans le salon. Tout y etait silencieux; alors ils passerent la tete et… horreur! Au milieu du parquet gisait le vieux Chinois, tombe en voulant les poursuivre et casse en trois morceaux; il n'avait plus de dos et sa tete avait roule dans un coin. Le sergent-major general se tenait la ou il avait toujours ete, meditatif.

– C'est affreux, murmura la petite bergere, le vieux grand-pere est casse et c'est de notre faute; je n'y survivrai pas. Et, de desespoir, elle tordait ses jolies petites mains.

– On peut tres bien le requinquer, affirma le ramoneur. Il n'y a qu'a le recoller, ne sois pas si desolee. Si on lui colle le dos et si on lui met une patte de soutien dans la nuque, il sera comme neuf et tout pret a nous dire de nouveau des choses desagreables.

– Tu crois vraiment?

Ils regrimperent sur la table ou ils etaient primitivement.

– Nous voila bien avances, dit le ramoneur, nous aurions pu nous eviter le derangement.

– Pourvu qu'on puisse recoller le grand-pere. Crois-tu que cela couterait tres cher? dit-elle.

La famille fit mettre de la colle sur le dos du Chinois et un lien a son cou, et il fut comme neuf, mais il ne pouvait plus hocher la tete.

– Que vous etes devenu hautain depuis que vous avez ete casse, dit le «sergentmajorgeneralcommandantenchefauxpiedsdebouc». Il n'y a pas la de quoi etre fier. Aurai-je ou n'aurai-je pas ma bergere?

Le ramoneur et la petite bergere jetaient un regard si emouvant vers le vieux Chinois, ils avaient si peur qu'il dise oui de la tete; mais il ne pouvait plus la remuer. Et comme il lui etait tres desagreable de raconter a un etranger qu'il etait oblige de porter un lien a son cou, les amoureux de porcelaine resterent l'un pres de l'autre, benissant le pansement du grand-pere et cela jusqu'au jour ou eux-memes furent casses.

Le bisaieul

Le conte n'est pas de moi. Je le tiens d'un de mes amis, a qui je donne la parole: Notre bisaieul etait la bonte meme; il aimait a faire plaisir, il contait de jolies histoires; il avait l'esprit droit, la tete solide. A vrai dire il n'etait que mon grand-pere; mais lorsque le petit garcon de mon frere Frederic vint au monde, il avanca au grade de bisaieul, et nous ne l'appelions plus qu'ainsi. Il nous cherissait tous et nous tenait en consideration; mais notre epoque, il ne l'estimait guere.» Le vieux temps, disait-il, c'etait le bon temps. Tout marchait alors avec une sage lenteur, sans precipitation; aujourd'hui c'est une course universelle, une galopade echevelee; c'est le monde renverse.»

Quand le bisaieul parlait sur ce theme, il s'animait a en devenir tout rouge; puis il se calmait peu a peu et disait en souriant: «Enfin, peut-etre me trompe-je. Peut-etre est-ce ma faute si je ne me trouve pas a mon aise dans ce temps actuel avec mes habitudes du siecle dernier. Laissons agir la Providence.»

Cependant il revenait toujours sur ce sujet, et comme il decrivait bien tout ce que l'ancien temps avait de pittoresque et de seduisant: les grands carrosses dores et a glaces ou tronaient les princes, les seigneurs, les chatelaines revetues de splendides atours; les corporations, chacune en costume different, traversant les rues en joyeux cortege, bannieres et musiques en tete; chacun gardant son rang et ne jalousant pas les autres. Et les fetes de Noel, comme elles etaient plus animees, plus brillantes qu'aujourd'hui, et le gai carnaval! Le vieux temps avait aussi ses vilains cotes: la loi etait dure, il y avait la potence, la roue; mais ces horreurs avaient du caractere, provoquaient l'emotion. Et quant aux abus, on savait alors les abolir genereusement: c'est au milieu de ces discussions que j'appris que ce fut la noblesse danoise qui la premiere affranchit spontanement les serfs et qu'un prince danois supprima des le siecle dernier la traite des noirs.

– Mais, disait-il, le siecle d'avant etait encore bien plus empreint de grandeur; les hauts faits, les beaux caracteres y abondaient.

– C'etaient des epoques rudes et sauvages, interrompait alors mon frere Frederic; Dieu merci, nous ne vivons plus dans un temps pareil.

Il disait cela au bisaieul en face, et ce n'etait pas trop gentil. Cependant il faut dire qu'il n'etait plus un enfant; c'etait notre aine; il etait sorti de l'Universite apres les examens les plus brillants. Ensuite notre pere, qui avait une grande maison de commerce, l'avait pris dans ses bureaux et il etait tres content de son zele et de son intelligence. Le bisaieul avait tout l'air d'avoir un faible pour lui; C'est avec lui surtout qu'il aimait a causer; mais quand ils en arrivaient a ce sujet du bon vieux temps, cela finissait presque toujours par de vives discussions; aucun d'eux ne cedait; et cependant, quoique je ne fusse qu'un gamin, je remarquai bien qu'ils ne pouvaient pas se passer l'un de l'autre. Que de fois le bisaieul ecoutait l'oreille tendue, les yeux tout plein de feu, ce que Frederic racontait sur les decouvertes merveilleuses de notre epoque, sur des forces de la nature, jusqu'alors inconnues, employees aux inventions les plus etonnantes!

– Oui, disait-il alors, les hommes deviennent plus savants, plus industrieux, mais non meilleurs. Quels epouvantables engins de destruction ils inventent pour s'entre-tuer!

– Les guerres n'en sont que plus vite finies, repondait Frederic; on n'attend plus sept ou meme trente ans avant le retour de la paix. Du reste, des guerres, il en faut toujours; s'il n'y en avait pas eu depuis le commencement du monde, la terre serait aujourd'hui tellement peuplee que les hommes se devoreraient les uns les autres.

Un jour Frederic nous apprit ce qui venait de se passer dans une petite ville des environs. A l'hotel de ville se trouvait une grande et antique horloge; elle s'arretait parfois, puis retardait, pour ensuite avancer; mais enfin telle quelle, elle servait a regler toutes les montres de la ville. Voila qu'on se mit a construire un chemin de fer qui passa par cet endroit; comme il faut que l'heure des trains soit indiquee de facon exacte, on placa a la gare une horloge electrique qui ne variait jamais; et depuis lors tout le monde reglait sa montre d'apres la gare; l'horloge de la maison de ville pouvait varier a son aise; personne n'y faisait attention, ou plutot on s'en moquait.

– C'est grave tout cela, dit le bisaieul d'un air tres serieux. Cela me fait penser a une bonne vieille horloge, comme on en fabrique a Bornholmy, qui etait chez mes parents; elle etait enfermee dans un meuble en bois de chene et marchait a l'aide de poids. Elle non plus n'allait pas toujours bien exactement; mais on ne s'en preoccupait pas. Nous regardions le cadran et nous avions foi en lui. Nous n'apercevions que lui, et l'on ne voyait rien des roues et des poids. C'est de meme que marchaient le gouvernement et la machine de l'Etat. On avait pleine confiance en elle et on ne regardait que le cadran. Aujourd'hui c'est devenu une horloge de verre; le premier venu observe les mouvements des roues et y trouve a redire; on entend le frottement des engrenages, on se demande si les ressorts ne sont pas uses et ne vont pas se briser. On n'a plus la foi; c'est la la grande faiblesse du temps present.

4
Перейти на страницу:

Вы читаете книгу


Andersen Hans Christian - Contes merveilleux, Tome I Contes merveilleux, Tome I
Мир литературы