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Les Aventures De Pinocchio - Collodi Carlo - Страница 34


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– D’accord, revendez-moi! J’en serai ravi. – repliqua Pinocchio.

Mais en meme temps, il bondit et sauta loin dans l’eau. Tout en nageant allegrement pour s’eloigner de la rive, il cria au pauvre acheteur:

– Adieu, mon maitre. Si vous avez besoin d’une peau pour faire un tambour, pensez a moi!

Un peu plus loin, toujours nageant et riant, il lanca encore:

– Adieu, mon bon maitre. Si vous avez besoin d’un peu de bois pour allumer votre cheminee, pensez a moi!

Pinocchio s’eloignait a toute vitesse. C’etait devenu un petit point noir a la surface de l’eau. Parfois une paire de jambes emergeait de la mer ou alors il faisait des cabrioles dans l’eau, tel un dauphin de tres bonne humeur.

Nageant au hasard, Pinocchio apercut un rocher blanc comme du marbre sur lequel beguetait gentiment une jolie petite chevre qui lui faisait signe d’approcher.

La chose etonnante etait que cette chevre n’etait ni blanche, ni noire, comme le sont d’habitude la plupart des chevres, mais sa laine etait d’un bleu-nuit eclatant qui rappelait beaucoup la couleur des cheveux de la jolie petite Fee.

Evidemment, le c?ur de Pinocchio se mit a battre tres fort. Redoublant d’effort, il se dirigea vers le rocher blanc. C’est alors que surgit une tete horrible, celle d’un monstre marin qui venait a sa rencontre. Sa bouche grande ouverte etait un gouffre et decouvrait trois rangees de dents a faire peur meme en dessin.

Et vous savez qui etait ce monstre marin?

C’etait, ni plus ni moins, ce gigantesque Requin deja rencontre dans cette histoire et que l’on surnommait, a cause de ses nombreux massacres et de son insatiable voracite, «l’Attila des poissons et des pecheurs».

Vous imaginez l’epouvante qui saisit le pauvre Pinocchio a la vue de ce monstre! Il essaya de l’eviter, de changer de route, de le fuir mais l’enorme bouche s’approchait a la vitesse d’une fleche.

– Depeche-toi, Pinocchio! Je t’en supplie! – belait la jolie petite chevre.

Celui-ci nageait desesperement. Il se servait de tout: ses bras, sa poitrine, ses jambes, ses pieds…

– Cours! Cours, Pinocchio! Le monstre se rapproche!

Rassemblant toutes ses forces, la marionnette redoubla d’ardeur.

– Attention, Pinocchio! Le monstre te rejoint! Il arrive! Il arrive! Depeche-toi, je t’en supplie ou tu es perdu!

Il ne pouvait pas aller plus vite. Il filait comme une balle de fusil. Alors qu’il etait sur le point de toucher le rocher, la petite chevre se pencha et lui tendait deja ses pattes de devant pour l’aider a sortir de l’eau.

Mais c’etait trop tard! Le monstre l’avait rejoint et aspira la pauvre marionnette comme on gobe un ?uf. Ce fut si violent que Pinocchio, degringolant dans le corps du Requin, s’assomma et resta evanoui pendant un bon quart d’heure.

Quand il revint a lui, il ne savait plus ni qui il etait, ni ou il etait. Tout, autour de lui, etait plonge dans le noir le plus profond comme s’il etait entre dans un encrier plein d’encre. On n’entendait rien que, de temps en temps, de grandes bouffees de vent qui lui cinglaient le visage. Au debut, il ne comprit pas, puis il pensa que ces rafales devaient sortir des poumons du monstre. De fait, le Requin souffrait d’asthme et, quand il respirait, on aurait dit que soufflait la Tramontane.

Pinocchio chercha d’abord a se donner du courage mais quand il eut cent fois la preuve qu’il etait bien dans le corps du monstre, il s’effondra en larmes et se mit a gemir:

– Au secours! A l’aide! Oh, pauvre de moi! N’y a-t-il personne pour me sauver?

– Qui donc pourrait te sauver, malheureux! – grinca une voix dans le noir, felee comme une guitare desaccordee.

– Qui parle? – demanda Pinocchio qui tremblait de peur.

– C’est moi! Je suis un pauvre Thon que le Requin a avale en meme temps que toi. Et toi, quel poisson es-tu?

– Moi, je n’ai rien a voir avec les poissons. Je suis une marionnette.

– Et alors? Si tu n’es pas un poisson, pourquoi t’es-tu fait avaler par le monstre?

– Je n’en sais rien. D’ailleurs je ne me suis pas «fait avaler». C’est lui qui m’a avale. Nuance! Bon, et maintenant, qu’est-ce que l’on peut faire?

– Se resigner et attendre que le Requin nous digere.

– Mais je ne veux pas etre digere! – cria Pinocchio qui se remit a pleurer.

– Ben, moi non plus – fit remarquer le Thon – mais je suis philosophe et je me console en pensant que, pour un Thon, il est plus digne de mourir dans l’eau que dans la friture.

– Balivernes! – hurla Pinocchio.

– C’est mon opinion – se defendit le Thon – et toutes les opinions, comme l’assurent les Thons politiques, sont respectables!

– Moi, je veux m’en aller d’ici. Je veux m’en aller…

– Va-t-en, si tu y arrives.

– Il est vraiment gros ce Requin? – questionna la marionnette.

– S’il est gros? Son corps mesure plus d’un kilometre de long, sans compter la queue.

Tandis qu’ils conversaient ainsi, Pinocchio crut discerner dans le lointain une vague lueur.

– Cette lueur, tout la-bas, qu’est-ce que c’est? demanda Pinocchio.

– Sans doute un autre malheureux qui attend d’etre digere.

– Je vais aller voir. Il s’agit peut-etre d’un vieux poisson qui sait, lui, comment sortir d’ici.

– Je te le souhaite, chere marionnette.

– Alors, adieu le Thon.

– Adieu, la marionnette. Et bonne chance!

– On se reverra?

– Qui sait? Le mieux est de ne pas y penser!

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